Réflexions du CCPSA Mars 2022

Reflexions due CCPSA

Contribution de Stephanie Benay, PSAC

Photo of Stephanie Benay, CRSP

Les femmes dans le domaine de la sécurité et la Journée internationale de la femme, le 8 mars

Je travaille dans le secteur de la sécurité depuis maintenant 25 ans, et la façon d’aborder la santé et la sécurité au travail a considérablement changé depuis. Je suis ravie de l’évolution de notre statut de « police de la sécurité » à celui de partenaire dans l’exécution du travail en toute sécurité. J’aimerais pouvoir dire que j’ai constaté la même évolution pour les femmes dans notre secteur d’activité, mais ce n’est pas le cas.

Je m’explique.

En 2017, un groupe de professionnelles en sécurité s’est réuni à Calgary pour discuter des problèmes auxquels chacune d’entre nous était confrontée dans sa carrière. Les femmes présentes provenaient de tous les secteurs d’activité, se situaient à différentes étapes de leur carrière et occupaient différents postes dans le domaine de la sécurité, c’est-à-dire des professionnelles en entreprise, des techniciennes et des consultantes.

La conversation avait été très animée, de nombreux problèmes avaient été soulevés et nous avions reconnu que des solutions viables étaient plus facilement réalisables en travaillant ensemble. Les discussions avaient porté sur un grand nombre de problèmes qui persistent depuis le début de ma carrière, tels que l’intimidation et le harcèlement des femmes dans le domaine de la sécurité, la violence sexuelle sur les chantiers, le manque d’équipements de protection personnelle adaptés à la femme, le manque de possibilités d’avancement professionnel ou de postes sur le terrain, et les préjugés contre les jeunes professionnelles. Ces expériences étaient les mêmes que j’avais vécues en tant que jeune femme dans le domaine de la sécurité et, malgré les politiques d’entreprise mises en place en matière de sécurité psychologique et de violence psychologique, la situation ne s’améliorait pas. 

Pour nos professionnelles chevronnées, le sexisme qu’elles avaient subi s’exprimait souvent par des questions visant à savoir si « elle pouvait faire le travail » ou si elle pouvait concilier avancement professionnel et obligations familiales, des sujets qui ne sont jamais abordés pour leurs homologues de sexe masculin. La question autour de l’avancement de carrière portait souvent sur les capacités émotionnelles ou mentales de la femme plutôt que sur ses compétences et son expérience. Cela se traduisait par des micro-agressions au travail en ignorant leurs idées ou en les présentant sous un angle négatif en disant qu’elles sont mal informées, alors que la même idée proposée par un collègue masculin était applaudie pour son caractère stratégique. Nous avons discuté du plafond de verre auquel nous étions confrontées, et aussi du fait que les professionnels en sécurité de tout sexe confondu ne parviennent pas à avoir un siège à la table des dirigeants. Nous manquions d’encadrement professionnel, de possibilités de formation et d’activités de réseautage dans le secteur.

C’est ce jour-là que la Women in Occupational Health and Safety Society (www.WOHSS.com) a vu le jour. Nous avons décidé, collectivement avec nos consœurs, nos confrères et d’autres personnes au Canada, d’être le changement que nous voulons voir dans notre industrie. Nous avons essuyé de nombreuses critiques; par exemple : nous ne devrions pas dénoncer ces problèmes; ce ne sont pas de vrais problèmes; les femmes volent déjà des emplois; que voulons-nous de plus? Oui, nous recevons ce genre de remarques provenant d’hommes ou de femmes. Mais nous avons aussi un soutien exceptionnel. Notre partenariat stratégique avec le CCPSA est l’une de ces relations qui reconnaissent qu’une main-d’œuvre diversifiée, inclusive et équitable est meilleure pour notre industrie.

Je rêve du jour où les conversations avec des femmes qui travaillent sur le terrain ne tourneront pas autour des récents gadgets à installer sur la poignée de porte de notre chambre d’hôtel ou de camp pour dissuader les intrus. Je rêve du jour où on ne traitera pas une femme professionnelle de chienne ou on ne lui demandera pas si elle est SPM lorsqu’elle réplique aux propos tenus par son interlocuteur. Je rêve du jour où l’on ne remettra pas en question la valeur ou le leadership d’une jeune professionnelle en sécurité lorsqu’elle travaille sur le terrain avec ses confrères moins expérimentés. Je rêve du jour où une promotion sera accordée de manière équitable, et où la situation familiale ou matrimoniale d’une personne ne sera pas un non-dit des critères. Je rêve du jour où l’on ne demandera pas à une professionnelle en sécurité d’apporter le café, d’organiser la fête du bureau ou de rédiger le procès-verbal parce que « les femmes sont meilleures pour faire ces tâches ». Je rêve du jour où l’on ne me demandera pas si mon mari est d’accord avec ma carrière ou si je me sens coupable de ne pas être plus présente à la maison pour élever mes enfants. Je rêve du jour où une femme pourra exprimer ses émotions sans être décrite comme étant trop émotive ou, à l’inverse, pas assez maternelle lorsqu’elle n’est pas émotive. Je rêve du jour où la valeur des professionnels en sécurité sera perçue comme une occasion exceptionnelle, puisque nous sommes familiers avec tous les aspects de l’entreprise, et où nous obtiendrons une place à la table des dirigeants, voire à la tête. 

Le mardi 8 mars est la Journée internationale de la femme et le thème de cette année est #BriserLesPréjugés (#BreaktTheBias). Je vous invite à commencer comme industrie à dénoncer collectivement les préjugés, à remettre en question les stéréotypes sexistes et à dénoncer les hypothèses ou les gestes tenant compte du genre dans nos milieux de travail.

La troisième édition du sommet Women in Safety se tiendra au Canada le 10 mars (www.womeninsafety.ca). Si vous souhaitez comprendre comment mieux soutenir les femmes avec lesquelles vous travaillez, comprendre les problèmes auxquels nous sommes confrontées ou montrer votre soutien, rejoignez un millier de vos collègues de partout au Canada qui prendront part à ce sommet virtuel. 

Enfin, je vous remercie pour votre soutien à l’égard des femmes dans tous les secteurs d’activité et pour défendre leurs intérêts. 

Stephanie

#BreakTheBias